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Blauzac en 1838
Le Maire répond à une enquête statistique demandée par le Préfet...

Statistique Générale Blauzac en 1838 - Source : Archives Départementales du Gard,  6 M 652

En 1838 la préfecture du Gard demande à tous les maires du département de répondre à un questionnaire pour servir à l'établissement de la Statistique générale du Gard. Les réponses sont aujourd’hui conservées par les Archives départementales du Gard (6 M 652). En 1842 sera publiée à Nîmes la Statistique du département du Gard par Hector Rivoire. En 1868 c’est Eugène Germer-Durand qui publie son Dictionnaire topographique du département du Gard.

 

Au 19e siècle, l’administration avait multiplié ces vastes enquêtes statistiques, souvent très précises, mais dont il ne faut pas méconnaitre les limites, les biais méthodologiques, voire idéologiques. Malgré ces « défauts », elles constituent d’irremplaçables documents historiques, à peu près contemporains du cadastre napoléonien…

 

Questions pour servir à la Statistique générale du Gard [1]

 

Chapitre 1er : Histoire

 

Question 1. Quels sont les principaux faits et évènements historiques qui se sont passés dans la commune, depuis son origine jusqu’à une époque assez rapprochée de nos jours ?

(Tout en appréciant la difficulté que présente la solution de cette question, il eut été impossible de ne pas la poser ici. Si un grand nombre de communes n’offrent que peu de ressources aux recherches historiques, il en est d’autres qui fournissent, au contraire, de précieux documents. De toute manière, il serait à désirer que la réponse à cette question fût de nature, tant par son intérêt que par son exactitude, à être utilement classée dans l’ensemble des recherches qui ont pour objet l’histoire générale du pays.)

Réponse du Maire de Blauzac. Il y sera répondu après des recherches.

 

Question 2. Quels sont les monuments les plus anciens qui peuvent exister dans la commune, tels que voies romaines, bornes milliaires (en ayant soin de reproduire leurs inscriptions et leurs dates), autels antiques, tauroboles, fragments de colonnes, bas-reliefs, aqueducs, anciens châteaux, monastères, vieilles chartes ?

Réponse. Il y a un ancien château dont on ignore l’origine. Il y a aussi une pierre tumulaire qui pourrait avoir été gravée du temps d’Auguste.

 

Question 3. Quel est l’état des monuments les plus anciens de la commune ?

Réponse. Le château déjà cité est en fort mauvais état. Il appartient à un particulier.

 

Question 4. Quels sont les objets les plus curieux de la commune, site, etc. ?

Réponse. Néant.

 

Chapitre 2 : Topographie

 

Question 1. Quelle est la distance en kilomètres de la commune au chef-lieu :

- du canton : 6 km

- de l’arrondissement : 6km

- du département : 16 km

 

Question 2. A quelle distance et à quel aspect la commune est-elle des villes es plus voisines, et quelles sont ces villes ?

Réponse. Nîmes au midi 16 kilomètres ; Uzès au nord-est 6 kilomètres.

 

Question 3. Quels sont les fleuves, rivières ou ruisseaux qui arrosent la commune ?

Réponse. Néant.

 

Question 4. Y a-t-il un bureau de poste ?

Réponse. Néant.

 

Question 5. Quelle est la superficie en hectares des :

- Bois de l’Etat : néant

- Bois communaux : néant

- Bois particuliers : néant 

- Terres labourables, jardins : 158 ha (« jardins » est rayé par le maire)

- Marais : rien d’écrit

- Vignobles : 429 ha

- Prairies : rien d’écrit

- Pâturages : rien d’écrit

- Routes, chemins vicinaux et canaux : une route d’Uzès à Nîmes 4 hectares ; 7 chemins vicinaux 7 hectares

- Terres incultes, bruyères ou garrigues : 203 ha

- Maisons et édifices publics : 3

- Nombre de maisons : 202 (la superficie est écrite puis barré)

 

Question 6. Le territoire de la commune est-il en plaines ou vallons, en montagnes ou collines (indiquer leurs noms) ?

Réponse. Il y a plaine, vallons, montagnes et collines. Aucun mont au nom remarquable.

 

Question 7. Quels sont les vents dominants dans la commune, en hiver et en été ?

Réponse. Vent du nord et du nord-est ; en été le vent communément appelé vent du soleil.

 

Question 8. Quelles sont les époques de la feuillaison, de la floraison, de la moisson, de la vendange ?

Réponse. 1° de la feuillaison : elle se fait sur la fin du mois d’avril et dans le courant du mois de mai. 2° de la floraison : elle a lieu au mois de mai. 3° de la moisson : elle se fait dans la fin du mois de juin. 4° de la vendange : elle se fait à la fin de septembre.

 

Question 9. Quelles sont les maladies les plus habituelles qui affectent les animaux domestiques tels que : chevaux, bœufs, vaches, mulets, ânes, moutons, brebis, cochons, chiens, vers à soie ?

Réponse. Inflammation [pour tous les animaux cités sauf les deux derniers de la liste]. Engorgement des glandes amygdales [pour les chiens]. Les gras [probablement la « grasserie » ou jaunisse] et les blancs [?] [pour les vers à soie] [2].

 

Question 10. Quels sont les hameaux qui font partie de la commune, et à quelle distance se trouvent-ils ?

Réponse. Malaigues [3] à 2 kilomètres.

 

Chapitre 3 : Population

 

Question 1. Quel est le nombre de famille dans la commune ?

Réponse. 200.

 

Question 2. Quel est le chiffre de la population ?

Réponse. 860 [4].

 

Question 3. Quel est annuellement le nombre des décès et celui des naissances.

Réponse. Décès 26 ; naissances 30.

 

Question 4. Quel est le chiffre de la population catholique ?

Réponse. 560.

 

Question 5. Quel est le chiffre de la population protestante de la commune ? Le nom de son église consistoriale et sa section.

Réponse. 300, Saint-Chaptes.

 

Question 6. Quel est le nombre des Anabaptistes et Quakers ?

Réponse. Néant [5].

 

Question 8 [en fait 7]. Quel est celui des Israélites ?

Réponse. Néant.

 

Question 8. Combien existe-t-il de ministres, savoir : du culte catholique, protestant, professé par les Quakers, par les Israélites ?

Réponse : 1 catholique, 1 protestant.

 

Question 9. Quel est le genre de plaisirs et d’amusements en usage dans la commune ?

Réponse. Danse, jeu de billard, jeu de boules et cabaret.

 

Question 10. Quelles sont les maladies qui affectent le plus ordinairement les habitants ?

Réponse. Pleurésie [6].

 

Chapitre 4 : Etablissements publics et de bienfaisance

 

Question 1. Combien existe-t-il d’hospices dans la commune ?

Réponse. Néant.

 

Question 2. Quel est le nombre de malades qu’on y reçoit ?

Réponse. Néant.

 

Question 3. Combien existe-t-il d’établissements de bienfaisance ?

Réponse. 1 [7].

 

Question 4. Quel est le nombre d’individus de tout âge et de tout sexe secourus par les établissements de bienfaisance ?

Réponse. 6.

 

Chapitre 5 : Instruction publique

 

Question 1. Quel est le nombre d’établissements consacrés à l’instruction publique ? [8]

Réponse. 2.

 

Question 2. Quel est le nombre d’écoles supérieures, secondaires, élémentaires ?

Réponse. 3 élémentaires.

 

Question 3. Quel est le nombre de maîtres, professeurs, instituteurs et institutrices ?

Réponse. 3.

 

Question 4. Quel est le nombre des élèves catholiques et protestants qui ont fréquenté annuellement les écoles supérieures, secondaires, élémentaires ?

Réponse. 80 (élémentaires) [9].

 

Question 5. Quel est, pour les deux sexes, le nombre de maisons d’école primaire catholiques, protestantes ?

Réponse. 1 catholique [10]. Néant protestante.

 

Question 6. Quelle est la méthode suivie par les instituteurs et institutrices dans leur enseignement ?

Réponse. Simultanée [11].

 

Chapitre 6 : Agriculture

 

Question 1. Quels sont les divers produits annuels, en nature, de la commune, en indiquant leur nom et leur quantité exprimés en quintaux métriques [12] :

- Céréales : 3000

- Fourrages : 2000

- Vignes : 500 hectos

- Oliviers : 200

- Bois de chauffage : 300

- Légumes : 800

- Fruits : 6

- Feuilles de mûriers : 6000

- Volailles : néant

- Laine : 50

- Cocons : 140

- Garance : néant

 

Question 2. Quelle est l’espèce, l’origine et le nombre des animaux que l’agriculture emploie ?

Réponse. Avec un grand nombre, tous natifs du pays ou des pays circonvoisins. Mules et bœufs 100 [13].

 

Question 3. Quel est l’espèce, l’origine et le nombre de ceux qui sont élevés pour la vente ?

Réponse. Néant.

 

Chapitre 7 : Industrie, commerce

 

Question 1. Combien existe-t-il d’établissements industriels (exprimer le nom, la valeur et la quantité de leurs produits en quintaux métriques) ?

Réponse. Néant [14].

- Tanneries : néant

- Fabriques d’étoffes de laine : néant

- Filature de laine : néant

- Fabriques de chapeaux : néant

- Filatures de soie : néant [15]

- Papeteries : néant

 

Question 2. Quelles sont les espèces, le nombre et la quantité de matières extraites des mines existant dans la commune, qui sont en exploitation ?

- Mines de fer : néant

- … de cuivre : néant

- … de plomb : néant

- … d’argent : néant

- … de charbon de terre : néant

- … de couperose [16], etc., etc. : néant

 

Question 3. Quels sont les produits en matières coulées ou manipulées des mines en exploitation (indiquer leur quantité et leur valeur) ?

Réponse. Néant.

 

Question 4. Y a-t-il des carrières en exploitation dans la commune (indiquer la quantité et la valeur de leurs produits) ?

- Fours à chaux : néant [17].

- Fabriques de tuiles ou briques : néant.

- … de faïence : néant.

- … de verrerie : néant.

- … de poterie : néant.

 

Question 5. A quel usage destine-t-on le chanvre et le lin récoltés dans la commune ?

Réponse. Néant.

 

Question 6. Existe-t-il des fabriques de toile ?

Réponse. Néant.

 

Question 7. Existe-t-il des fabriques d’eau-de-vie ? Quel est leur nombre et quels sont les noms des fabricants ?

Réponse. Néant.

 

Question 8. Quels sont les différentes espèces d’eau-de-vie et esprit qui se fabriquent dans la commune (indiquer la quantité et la valeur de leurs produits) ?

Réponse. Néant.

 

Question 9. Quel est le nombre des foires et marchés, leur date (indiquer les plus importants) ?

Réponse. Néant.

 

Question 10. Quels sont les principaux objets qui se vendent aux marchés et foires existants ?

Réponse. Néant.

 

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Commentaires

 

Le tableau dressé par le maire est celui d’un village consacré presque exclusivement aux activités agricoles. Les céréales, les fourrages, la vigne, les oliviers, les moutons et les vers à soie sont vraisemblablement les principales sources de revenus (en particulier les vers à soie avec 140 quintaux de cocons).

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Ce questionnaire datant de 1838, les terribles maladies agricoles de la deuxième moitié du 19e siècle n’ont pas encore touché la vigne (oïdium, mildiou, phylloxéra) et les vers à soie (pébrine). Les épidémies de choléra de la première moitié du 19e siècle ne sont pas évoquées par le maire. Elles avaient surtout affecté les villes et les villages aux rues étroites, humides, malsaines, et aux populations ouvrières nombreuses (Sauve, Durfort par exemple dans le Gard). Ce n’est pas le cas de Blauzac. La variole n’est pas mentionnée également.

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Les activités agricoles font vivre une population fort nombreuse : le maximum de population se situe entre le recensement de 1831 (858 habitants) et celui de 1851 (879 hab., un pic qui ne sera dépassé qu’avec le recensement de… 2007). Durant ces deux décennies, de nombreuses terres aux sols pauvres (avant l’âge des engrais chimiques) ou au relief ingrat sont défrichées et mises en culture. Le maire ne déclare d’ailleurs aucun « bois » (d’Etat, communaux ou privés). A partir de 1851, c’est un inexorable déclin démographique qui débute (572 hab. en 1911 ; le creux est atteint en 1968 : 393 hab.).

​

Contrairement à certains villages uzégeois, Blauzac ne possède pas, en 1838, d’activités commerciales (foires ou marchés), industrielles ou même d’extraction (peut-être un four à chaux). Les services administratifs sont minimaux (mairie, école) [18]. L’enquête ne demande pas le nombre de commerçants et d’artisans, mais il devait y en avoir. Le patrimoine bâti du village n’est pas mis en avant par le maire : ni le château, ni l’église, ni le temple par exemple.

 

Notes

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[1] Nous avons retranscrit l’intégralité des questions et des réponses. L’orthographe a été cependant actualisée et corrigée.

[2] Michel Vanderpooten, « L’hygiène des vers à soie d’Olivier de Serres à Louis Pasteur », dans : Les animaux malades en Europe occidentale (VIe-XIVe siècles), Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2005.

[3] Orthographe du document respectée.

[4] Le recensement de 1836 indique effectivement 860 habitants. Collectif, Paroisses et communes de France, Dictionnaire d’histoire administrative et démographique, Gard, CNRS, 1986.

[5] Ils étaient particulièrement bien implantés dans le Gard au 19e siècle.

[6] Le maire ne cite pas des maladies pourtant très présentes alors : choléra, variole, tuberculose, etc.

[7] On n’en sait malheureusement pas plus.

[8] Le loi Guizot de 1833 oblige toutes les communes de plus de 500 habitants à posséder une école. Mais l’instruction n’est ni gratuite ni obligatoire.

[9] C’est peu. Le recensement de 1846 (Arch. dép. du Gard 6 M 195) indique 229 « garçons » et 196 « filles » (pour un total de population de 862, soit presque équivalent à celui de 1838). Mais il s’agit de tous les individus non mariés ou non veufs, et donc pas seulement des enfants en âge d’être scolarisés. 80 élèves dans trois classes, cela fait en moyenne 27 élèves par classe.

[10] On ne comprend pas très bien : 2 « établissements », 3 « écoles élémentaires », 3 « maitres », 1 « maison d’école ». Dans le même bâtiment il y aurait 2 établissements et trois classes, donc trois maîtres ? Mais rien pour les protestants ?

[11] Et non « mutuelle », une méthode souvent pratiquée dans les écoles protestantes.

[12] On peut évidemment douter des chiffres fournis par le maire. Comment savoir, par exemple, la production de légumes en quintaux ? 800 quintaux semblent d’ailleurs une masse considérable, surtout rapportée à celle des céréales (3 000) ou des fourrages (2 000). Autre exemple : le ramassage des feuilles de mûriers est familial, quotidien, et les feuilles sont consommées dans chaque élevage de vers à soie. Il parait impossible de bien en connaitre la masse totale ! Mais il sûr que Blauzac était un village très producteur de cocons : 140 quintaux c’est beaucoup. Ces cocons étaient vendus dans les usines d’Uzès.

[13] Le maire n’indique pas l’usage de chevaux pour l’agriculture.

[14] Sans cours d’eau capable de mouvoir des machines, il n’y a pas d’industries possibles à Blauzac. Les machines à vapeur sont encore rares en 1838.

[15] Elles sont à Uzès où elles emploient des centaines de jeunes filles, dont beaucoup sont originaires des villages alentours comme Blauzac.

[16] La « couperose » c’est le sel de l'acide sulfurique. La « couperose blanche » : sulfate de zinc. La « couperose bleue » : sulfate de cuivre. La « couperose verte » : sulfate de fer.

[17] La réponse n’est pas très claire. Peut-être 1 ?

[18] En 1790 Blauzac devient un chef-lieu de canton du district d’Uzès. Mais la réorganisation territoriale voulue par le Premier consul Bonaparte en 1801 lui fait perdre ce statut : Blauzac n’est plus qu’une commune du canton d’Uzès (qui devient un chef-lieu d’arrondissement, les districts disparaissant).

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